"Qui aurais-je été, moi, si Éliane m’avait eu d’un autre homme? Si elle m’avait conçu avec ce lieutenant Delor, j’aurais été un homme doux, sans doute, et posé comme lui.
J’essayais de me représenter physiquement : de taille moyenne, voire petit, de corpulence fine et sèche, j’avais la peau brune, des cheveux noirs frisés, denses et brillants – plus rien à voir, enfin, avec cette plaie de rouquin à la peau trop fragile.
Mon imagination s’arrêtait là et le commencement de fiction s’éventait aussitôt, aporétique et sans issue, puisqu’on ne récrit pas l’histoire, celle de son corps encore moins que celle des hommes."
En cette toute fin des années cinquante, Éliane a 20 ans quand elle tombe enceinte. André, le futur père, n’en a que 17 et ses parents s’opposent au mariage. Eliane a peur. André disparaît, sa propre mère la renie… Où trouver le courage de porter puis d’élever seule cet enfant ?
Gilles Leroy renoue ici avec la veine personnelle de son œuvre – dans la lignée de Machines à sous et de Grandir. Car Éliane et André sont ses propres parents. Dans ce roman familial, il dresse les portraits émouvants d’une mère séduisante et combative, d’un père amoureux et flambeur, tous deux adorés et complexes.
Avec une infinie tendresse, essayant d’imaginer leur vie avant lui et ce qu’elle aurait pu être sans lui, il cherche aussi à savoir d’où il vient, livrant de lui-même un autoportrait en creux.
Le monde selon Billy Boy a reçu le prix Marcel Pagnol.